Cinquième roman de John Steinbeck paru en 1937, Des souris et des hommes est une œuvre magistrale et intemporelle dont les différents niveaux de lectures illustrent les qualités d’écriture d’un Steinbeck qui n’avait jusqu’alors pas encore trouvé son (grand) public.
L’histoire se situe près de Soledad en Californie, ville se situant non loin de Salinas où est né et a vécu Steinbeck, dans le comté de Monterey (au sud de San Francisco).

Un roman californien
Plus qu’un écrivain américain, Steinbeck est peut-être avant tout un écrivain californien. Nombre de ses œuvres se passent en Californie :
- Tortilla Flat,
- Rue de la sardine,
- Tendre Jeudi,
- À l’Est d’Eden,
- Les raisins de la colère,
- En un combat douteux,
- Au Dieu inconnu,
- Les naufragés de l’autocar,
- Le Poney rouge
- La Perle (En Basse Californie au Mexique).
Son attachement à sa région s’exprime dans sa volonté de parler de ceux dont on ne parle jamais, les laisser pour compte, les pauvres…
En tant que romancier californien, Steinbeck aime à décrire les paysages, chaque rivière, chaque colline, trou de souris… qu’il présente avec habilité et un souci du détail qui vous plonge directement dans les lieux et l’action.
Des souris et des hommes ne fait pas exception à cette volonté de raconter la Californie. Monté en 6 chapitres qui sont autant d’actes et autant de lieux où se déroule l’action. Ainsi, chaque chapitre s’ouvre sur une description de l’endroit où se trouvent les protagonistes. S’ensuivent ensuite des dialogues entre les uns et les autres, le récit se pose et s’impose, les personnages s’affirment et s’engagent dans un destin qu’ils ne contrôlent plus vraiment.
Des souris et des hommes, le portrait d’une amitié par John Steinbeck
Le roman de Steinbeck raconte l’histoire de George et Lennie, deux amis qui vont de fermes en fermes à la recherche de travail. George est petit et sec, malin, Lennie est grand et fort, mais bête. Fou comme le résume George à plusieurs reprises.
Le roman se penche sur la relation entre les deux hommes qui nourrissent un rêve commun d’avoir leur propre maison où ils pourront vivre sans que personne ne les mette dehors. Leur coin à eux où ils pourront cultiver leurs légumes et avoir des lapins. Lapins que Lennie souhaite soigner.
Lennie adore toucher tout ce qui est doux. Lennie ne pense jamais à mal, Lennie est fort et n’a pas conscience du mal qu’il peut faire. C’est George qui le canalise, enfin, qui essaie de le canaliser.
George et Lennie arrivent donc dans une ferme après avoir dû fuire leur dernier travail où Lennie avait fait peur à une petite fille parce qu’il voulait caresser sa robe rouge. Lennie est obsédé par les choses douces. Il tient une souris morte dans sa poche pour pouvoir profiter de sa douceur ce qui met George en rogne.
Ce nouveau travail est l’occasion pour George et Lennie de caresser leur doux rêve d’avoir leur propre maison. Ils s’accrochent à ça et Lennie aime entendre George lui rappeler leur projet. Mais pour cela il faut de l’argent et donc garder un travail…
Au ranch, Lennie et George sont accueillis froidement par le fils du patron, ancien boxeur, qui aime à se mesurer aux autres. Lennie, qui a promis de ne pas faire de bêtise, devient la cible du fils du patron. Lennie se laisse frapper, attendant que George lui dise de se défendre. George l’y autorise et Lennie broie littéralement la main de son asseyant.
La violence est partout dans ce roman. Les conditions de vie des travailleurs, la misère, la solitude, le chien qu’on abat car il ne sert plus à rien, Steinbeck, dans ce récit, traite des thèmes qui feront sa renommée : les travailleurs pauvres, les rapports de force entre riches et pauvres, les difficultés à se sortir de sa misère, la violence des hommes entre eux.
Des souris et des hommes est un roman important. De par ses thématiques, mais aussi par sa structure. Les liens entre George et Lennie montrent une amitié sincère entre deux hommes que tout oppose. La figure de George qui prend soin de Lennie sans rien attendre en retour est une bouffée d’oxygène même si ce dernier se plaint souvent des agissements de Lennie. Il y a de l’amour entre ces deux hommes, un amour fraternel, gratuit, généreux.
La fin, terrible, tragique, n’offre aucun échappatoire. Rêver est un luxe, réaliser son rêve une illusion. Une illusion qui apporte du bonheur à des hommes qui ne possèdent rien d’autre que leurs pensées.