Meilleurs albums Jazz 2024

Ambrose Akinmusire, talent générationnel du Jazz, dévoile avec Owl Song un album d’une profondeur et d’une beauté saisissantes. Accompagné par le légendaire guitariste Bill Frisell et le batteur Herlin Riley, Akinmusire livre huit compositions originales puissantes et profondes. Les morceaux naviguent entre textures riches et grooves envoûtants, qui démontrent une maîtrise technique et une complicité musicale exceptionnelles. L’album offre un équilibre subtil entre exploration sonore et expression émotionnelle, captivant l’auditeur dans un univers à la fois intime et universel.

Cet opus, véritable joyau du Jazz contemporain, confirme le statut d’Akinmusire comme figure incontournable de la scène Jazz actuelle et promet une expérience musicale captivante pour tous les amoureux du genre.

Dans The Sky Will Still Be There Tomorrow, Charles Lloyd, légende vivante du saxophone, démontre une fois de plus qu’il n’a pas fini de nous étonner. À travers cet album, sorti à l’occasion de son 86ème anniversaire, Lloyd explore avec une joie contagieuse des morceaux sublimes, des hommages passionnés, le tout, accompagné d’un groupe talentueux composé de Jason Moran au piano, Larry Grenadier à la basse et Brian Blade à la batterie​.

L’album est une exploration musicale qui traverse les émotions et les traditions spirituelles, joué par une formation qui offre une nouvelle vitalité aux compositions. Defiant, Tender Warrior (le morceau d’ouverture) établit d’emblée une ambiance envoûtante, tandis que Monk’s Dance rend hommage à Thelonious Monk avec des solos de saxophone qui démontrent la capacité de Lloyd à se servir de sa superbe technique pour nous transmettre moults émotions. À travers des pièces comme The Lonely One et The Sky Will Still Be There Tomorrow, Lloyd et son quatuor naviguent entre douceur et intensité, offrant une œuvre à la fois réfléchie et exaltante, qui témoigne du talent intemporel de Lloyd.

L’enregistrement du concert d’Alice Coltrane au Carnegie Hall, offre une expérience d’une intensité rare, à la croisée des chemins entre le Jazz spirituel, l’avant-garde et la musique indienne classique. Au cours de cette soirée mémorable de 1971, Coltrane, accompagnée d’une pléiade de musiciens de Jazz légendaires tels que Pharoah Sanders et Archie Shepp, ainsi que de deux ensembles de bassistes et de batteurs, a plongé l’audience dans un univers sonore tumultueux. Les pièces interprétées, allant de compositions propres à des reprises de morceaux de John Coltrane, illustrent la quête spirituelle et artistique d’Alice Coltrane, mêlant habilement les textures du Jazz avec des éléments de musique indienne.

L’enregistrement se dresse comme un monument dans l’œuvre d’Alice Coltrane. Le concert du Carnegie Hall révèle la profondeur et la richesse de son héritage musical, affirmant son rôle dans l’évolution du Jazz. Plus qu’une archive historique, cet album est une véritable source d’inspiration, témoignant de la liberté créative d’Alice Coltrane.

Compassion de Vijay Iyer, en compagnie de Linda May Han Oh et Tyshawn Sorey, s’éloigne des expérimentations électroniques de ses précédents projets pour embrasser une formation plus traditionnelle de Jazz en trio. Iyer explore des compositions avant-gardistes et post-bop, tout en rendant hommage à d’autres figures du Jazz.

L’album se distingue également par la qualité de son exécution. Iyer, Oh et Sorey, parviennent à fusionner mélancolie et optimisme dans une danse sonore subtile et enlevée. Oh, avec son approche mélodique de la contrebasse, et Sorey, dans une performance plus retenue, contribuent à la richesse et à la complexité de l’album.

Un album tout autant pour les auditeurs occasionnels de Jazz que pour les aficionados​.

Pas facile d’accès, l’album se révèle pourtant puissant et envoûtant.

« Fearless Movement » de Kamasi Washington est un album qui démontre une fois de plus la capacité du saxophoniste à fusionner les genres et à repousser les limites du Jazz contemporain. Cet album est une véritable célébration de la diversité musicale. Dès les premières notes de « Lesanu », Washington impose avec énergie des arrangements complexes et dynamiques qui rappellent le style de Charles Mingus. Des morceaux comme « Asha the First », avec Thundercat et les frères Austin, offrent une fusion de Jazz et de Rap, tandis que « Computer Love », le tube de Zapp & Roger sorti en 1985, est revisité avec brio.

L’ensemble est une œuvre tout simplement magistrale, personnelle et politique, nourrie pas des influences anciennes et modernes. Un album de Jazz fusion brillant qui confirme le statut de Kamasi Washington comme figure centrale de la scène Jazz actuelle.

« D-Day » de Monty Alexander est un album qui célèbre à la fois le 80ème anniversaire du débarquement de Normandie et les 80 ans du pianiste. Cet album, enregistré principalement au Studio Sextan à Paris, mêle des standards de la période de la Seconde Guerre mondiale à des compositions originales d’Alexander. Les morceaux tels que « I’ll Never Smile Again » et « Smile » de Charlie Chaplin renvoient une certaine nostalgie douce et élégante, tandis que les titres originaux comme « Aggression », « Restoration » et « June 6 » explorent des thèmes de conflit, d’espoir et de renaissance.

Monty Alexander, accompagné de Luke Sellick à la contrebasse et Jason Brown à la batterie, réussit à créer une ambiance qui oscille entre la vivacité du Jazz moderne et la tendresse de ballades plus anciennes. « D-Day » se distingue par ses arrangements méticuleux, d’un pianiste émérite et de talent. Un album qui sent bon l’amour pour le swing, accessible, et déjà intemporel.

« True Story » est une véritable exploration du Jazz sud-africain, mêlant intelligemment des éléments traditionnels de la musique sud-africaine à des éléments plus modernes. Le tromboniste Malcolm Jiyane Tree-O nous livre ainsi des compositions riches en émotions et en nuances et réalise un album qui se distingue par son mélange de mélodies douces et de tempos entraînants, reflétant la beauté et les rythmes sud-africains.

L’album navigue entre des mélodies introspectives et universelles et dévoile le talent de Malcolm Jiyane Tree-O pour créer une œuvre cohérente et captivante, confirmant son statut de figure montante du Jazz. Un album accessible et déjà un incontournable de l’année 2024 !

« Night Reign, » le nouvel album d’Arooj Aftab, nous offre un véritable voyage sonore qui mélange les influences du Jazz occidental avec la musique folklorique qawwali de son Pakistan natal. L’album présente une diversité d’instruments et de sonorités qui vont des harpes aux pianos en passant par les percussions. Les morceaux tels que « Aey Nehin » et « Na Gul » démontrent une complexité musicale avec des interprétations vocales profondes.

« Night Reign » est un album magnifique qui offre une expérience auditive immersive et réconfortante.

Un harmonica et un piano (et d’autres petites choses) pour reprendre façon Jazz quelques grands morceaux du maître Ennio Morricone. Sublime.

L’album Endlessness de Nala Sinephro, est une véritable exploration méditative sur le sens de l’existence. Durant dix morceaux, la musicienne belgo-caribéenne tisse une toile sonore basée sur un arpège central qui se métamorphose au fil des titres. Dès « Continuum 1 », les percussions flottantes de Morgan Simpson et les synthétiseurs planants de Sinephro nous plongent dans un voyage cosmique.

Nala Sinephro livre une œuvre transcendante, où chaque morceau offre de nouvelles perspectives sonores tout en maintenant une cohésion remarquable. Une performance poétique qui consolide la place de Sinephro parmi les voix les plus innovantes de la scène Jazz contemporaine.

L’album Milton + Esperanza est un album collaboratif entre la légende brésilienne Milton Nascimento et la bassiste-chanteuse américaine Esperanza Spalding. Cet album de 16 morceaux est un hommage à la longue carrière de Nascimento, mêlant tradition brésilienne et Jazz contemporain. Spalding y revisite plusieurs classiques du répertoire de Nascimento, tels que « Cais » et « Saudade Dos Aviões Da Panair », tout en y apportant sa propre touche avec des réarrangements subtils et des orchestrations modernisées. En plus de ces réinterprétations, l’album inclut des compositions originales de Spalding et des reprises étonnantes, comme celle des Beatles avec « A Day in the Life ». L’album se conclut par une version joyeuse de « When You Dream » de Wayne Shorter, marquant l’influence persistante de ce dernier sur les deux artistes.

Bien que profondément enraciné dans l’univers de Nascimento, l’album est marqué de l’emprunte de Spalding grâce à l’introduction d’une esthétique sonore contemporaine avec des couches électroniques et des influences funk. Un album aussi poétique que puissant, qui ravira autant les fans de Nascimento que ceux de Spalding.

Selected Worlds de Daniel Inzani est une œuvre monumentale qui défie les frontières du Jazz et nous plonge dans un univers sonore riche et diversifié. Ce triple album, divisé en trois disques distincts, nous offre une exploration profonde de la personnalité musicale de l’artiste. Une personnalité riche, structurée et innovante.

Chacun des disques à son propre univers, et malgré cela, il y a une réelle cohérence narrative qui les relie. Inzani, pianiste émérite, réussit à créer un arc sonore qui nous emporte dans des mondes différents, mais toujours avec beaucoup d’émotions. Selected Worlds est une œuvre qui mérite d’être découverte et réécoutée à plusieurs reprises, tant elle est riche et complexe. Un album surprenant, inattendu, bienvenu !

Orrin Evans et son Captain Black Big Band nous offrent une expérience musicale captivante avec leur dernier album Walk a Mile in My Shoe. Cette œuvre, profondément personnelle, explore les défis de santé d’Evans tout en célébrant la résilience et l’espoir.
L’album brille par sa diversité vocale, mettant en vedette des artistes de renom tels que Bilal, Joanna Pascale et la légendaire Lisa Fischer. Ces voix apportent une dimension soul et blues qui enrichit considérablement le son du big band.

Walk a Mile in My Shoe est une œuvre ambitieuse qui réussit à marier le Jazz traditionnel avec des influences soul et blues contemporaines. Orrin Evans et le Captain Black Big Band ont créé un album qui non seulement divertit, mais aussi émeut et inspire, confirmant leur place parmi les ensembles Jazz les plus innovants de notre époque.

Imaginez ma surprise lorsqu’en ouvrant mon application de streaming musical, on me proposait le nouvel album de Roy Hargrove. Mon cœur a d’abord réagi en exprimant un grand bonheur, puis mon cerveau s’est rappelé que l’homme était mort en 2018, ce qui m’a brisé le cœur à nouveau, 6 ans plus tard… C’est étrange comme parfois le cœur refuse d’admettre certaines choses…

Car je dois dire que Roy Hargrove est un de mes jazzmen préférés, j’aime écouter ses disques régulièrement, j’y trouve du sens, une identité, un langage. Et cet album ne fait pas exception… je l’écoute en boucle depuis sa sortie.

C’est donc un album posthume qui nous est livré, et en général, ça fait plutôt peur niveau qualité. Sauf que là, l’album a été enregistré en 1997, et il est resté dans les placards car le bonhomme avait tellement de projets différents, que cette couleur musicale ne lui semblait plus celle qu’il voulait continuer à explorer.

Heureusement, dans le but de célébrer son héritage musical, cet album a vu le jour. Il était fin prêt, il n’y avait plus qu’à le diffuser.

Et quel plaisir de réentendre la trompette de ce petit génie découvert par Wynton Marsalis (grand génie de la trompette) ! On y retrouve le Jazz énergique et instinctif caractéristique de Hargrove, des morceaux qui mêlent habilement Jazz, rythmes caribéens et influences afro-cubaines, et on a le droit à un incroyable moment de trompette dans le dernier morceau Priorities.

Si l’album reste classique malgré tout, cela lui permet d’être particulièrement accessible et facile à appréhender.

J’avais adoré The 7th Hand, le précédent album d’Immanuel Wilkins. J’attendais donc ce nouveau disque avec impatience !

Immanuel Wilkins nous revient avec Blues Blood, son 3e album, une œuvre ambitieuse et profondément méditative, mais complexe et difficile à appréhender. Malgré les sublimes voix de June McDoom et Cécile McLorin Salvant, il m’a fallu plusieurs écoutes pour adopter le disque, et je dois avouer que ce n’était pas gagné à cause d’une couleur expérimentale parfois difficile d’accès.

Clairement, c’est un album qu’il faut chercher à comprendre. Si certains morceaux tels que Matte Glaze et Motion partagent une énergie joyeuse, certains autres s’enfoncent dans des paysages sombres. Faut dire que le titre de l’album fait référence à une citation de Daniel Hamm, membre des Harlem Six, passés à tabac en prison dans l’attente de leur procès pour un meurtre dont ils étaient accusés à tort.

Un album sans doute audacieux, une expérience à découvrir, à ne pas mettre dans toutes les oreilles, mais un album qui continue à prouver le talent de Wilkins.

Ezra Collective se distingue par une approche très moderne, voire novatrice, du Jazz, avec un mélange de genres tels que l’afrobeat, le funk, et le hip-hop.

Quintet formé en 2015 à Londres, le parcours du groupe est jalonné de succès, avec l’an passé une victoire historique au Mercury Prize (meilleur album britannique ou irlandais) pour leur album Where I’m Meant to Be, une 1ère pour un groupe de Jazz ! Porteurs d’un Jazz hybride et contemporain, le groupe s’impose dès lors comme le fer de lance de la scène Jazz britannique.

Leur 3e album, Dance, No One’s Watching, est un véritable souffle de fraicheur dans le paysage Jazz 2024, une célébration vibrante de la musique et de la danse. C’est joyeux, prenant, le mélange intelligent des genres donne au tout une atmosphère festive et entraînante qui rend le tout non seulement accessible, mais aussi particulièrement fédérateur.

Un gros plaisir à écouter sans modération.