Quand vous êtes passionné par quelque chose qui n’est pas très bien considéré par le grand public, c’est assez difficile d’expliquer pourquoi on est tellement pris par la chose.
J’aime par exemple le film The Thing plus que de raison. Un monstre extra-terrestre qui tue petit à petit tous les membres d’une station scientifique en Antarctique, ça fait mauvais genre lors d’un premier rendez-vous…
– Tu aimes le cinéma Jules ? C’est quoi ton film préféré ?
– The Thing. Version John Carpenter en 1982, pas celle de 1951, The Thing from Another World, réalisée par Christian Nyby, bien que la légende veuille que ce soit Howard Hawks qui l’est réalisé à vrai dire…
– Ah ? Et ça parle de quoi ?
– D’un monstre alien qui peut prendre la forme de n’importe quel être vivant, un chien, un être humain, et qui tue les gens en les avalant littéralement.
– Ah… Et c’est ton film préféré ?
– Oui… Et toi c’est quoi ton film préféré ?
– Love Actually.
– Ah ah ! Et moi qui croyais que tu aimais le cinéma !
– Mais…
Ceci est une histoire vraie.
Il y a eu néanmoins des versions différentes du dialogue.
Outre Love Actually, j’ai eu droit à Bad Boys 2 (elle venait de le voir et trouvait le film trop bien), P.S. I Love You, mais aussi des choses plus intéressantes comme Eternal Sunshine of the Spotless Mind (faut dire que la reprise de la chanson Everybody’s Gotta Learn Sometimes par Beck est sublime), ou encore Sur la Route de Madison.
Comme je suis curieux, j’ai systématiquement regardé les films en question. Je n’ai pas pu aller au bout de Love Actually, je n’ai pas compris comment on pouvait penser que Bad Boys 2 méritait d’exister en tant qu’oeuvre cinématographique, j’ai pleuré à chaudes larmes devant P.S. I Love You, que je déconseille si vous avez perdu l’amour de votre vie parce que ça vous fout plus bas que terre. Bon, si je veux être honnête, j’ai malgré tout apprécié bien des films dont on m’a parlé.
Sauf que The Thing n’a globalement jamais eu de succès auprès de mes rencontres. Margaux et Manon ont aimé, Manon l’avait déjà vu plusieurs fois, je l’ai fait découvrir à Margaux lors d’un Halloween à manger des bonbons sur le canapé, cachés sous la couverture, et elle a eu la décence d’attendre le début du générique de fin pour me faire l’amour, sentant bien qu’à ce moment-là, j’étais plus captivé par le film que par sa personne. Il y en a, ils ne peuvent décrocher d’un match de foot, moi c’est de The Thing. La bonne nouvelle, c’est que je ne regarde pas ce film toutes les semaines, ce qui me permet de prendre soin de mon amoureuse le reste du temps.
Pourquoi The Thing ? Parce que c’est fabuleux, terrifiant à la fois, qu’il y a le très sous-estimé Kurt Russell, que ça se passe en Antarctique, que je rêve d’y aller, et qu’il y a un putain de monstre effrayant ! Et que dire de la maîtrise de la mise en scène de John Carpenter, des effets spéciaux magnifiques et de la tension omniprésente durant tout le film ?
Ce film a été mon premier DVD acheté. A l’époque, j’avais un PC de bureau dans lequel j’avais installé un lecteur DVD. Je regardais les films sur un écran un peu trop petit, assis sur ma chaise de bureau dans mon studio d’étudiant. Je me préparais à manger, me plongeais dans le noir, et au lieu de réviser mes cours d’Histoire, je regardais des films, beaucoup beaucoup de films. J’en téléchargeais certains, mais ceux que j’aimais, j’essayais de les acheter. The Thing, j’ai voulu le posséder parce que j’avais confiance en Carpenter et Russell. Je n’ai pas été déçu.
Vous avez déjà eu ce sentiment, quand vous vous réveillez le matin, d’avoir fermé les yeux cinq minutes plus tôt ? J’ai eu cette même sensation en regardant ce film pour la première fois. 109 minutes que je n’avais pas vues passer.
Quand vous passez le plus clair de votre temps à penser, à ressasser sans arrêt, tout le temps, le passé, les douleurs, les peines, je peux vous assurer qu’une telle bouffée d’oxygène vous fait le plus grand bien.
Et ça me le fait à chaque fois.